Le rôle de l’accord pelagos

Le Sanctuaire Pelagos est la seule zone maritime internationale dédiée à la protection des mammifères marins et de leurs habitats en Méditerranée. Il a été créé par un accord multilatéral entre la France, l’Italie et la Principauté de Monaco, signé à Rome en 1999 et entré en vigueur en 2002. C’est en 2001 que le Sanctuaire Pelagos est inscrit sur la liste des Aires Spécialement Protégées d’Importance Méditerranéenne (ASPIM) dans le cadre de la Convention de Barcelone.

Le rôle principal de l’Accord Pelagos est de promouvoir des actions et des mesures de gestion harmonisées en faveur de la protection des cétacés et de leurs habitats contre toutes les causes possibles de perturbation et de mortalité d’origine humaine (par exemple, la pollution, le bruit, les captures accidentelles, les blessures, etc.)

Outre les diverses législations nationales réglementant les activités humaines dans le Sanctuaire, au niveau national, des petites zones du Sanctuaire bénéficient d’une protection plus stricte grâce à la présence de nombreuses zones marines protégées, de parcs nationaux, de sites Natura 2000 de l’UE et d’ASPIM respectives à chacun des trois pays.

Les raisons de l’Accord

Des documents et des découvertes datant de plusieurs siècles suggèrent que l’abondance des mammifères marins en Méditerranée n’est pas un phénomène nouveau. Le prince Albert Ier de Monaco (1885-1910) connu sous le nom de prince des mers en raison de sa grande passion pour les voyages en mer et la recherche scientifique, aurait vu plus de cétacés depuis la fenêtre de son palais que depuis les navires sur lesquels il a navigué.

Au fur et à mesure que la recherche scientifique progresse et que des données sont collectées, les raisons d’une telle richesse biologique sont mises en lumière et l’importance de cette zone devient évidente.

Le lien entre environnement, production primaire et présence de petites et grandes créatures marines est régulièrement étudié pour comprendre et préserver les écosystèmes de l’urbanisation, de la pêche, de la navigation, des activités récréatives etc.

L’importance écologique de cet écosystème marin dans ladite zone est confirmée dans les années 2010 par la Convention des Nations unies sur la biodiversité, qui a identifié deux ZIEB (zones marines d’importance écologique ou biologique) recouvrant entièrement le Sanctuaire Pelagos : les écosystèmes pélagiques de la Méditerranée nord-occidentale et les écosystèmes benthiques de la Méditerranée nord-occidentale. Plus récemment, l’UICN a identifié deux IMMA (zones importantes pour les mammifères marins) dans cette région : l’IMMA de la mer Ligurienne occidentale et du canyon de Gênes (un habitat clé pour la baleine à bec de Cuvier) et l’IMMA de la mer Méditerranée du Nord-Ouest, de la pente et du système de canyons (un habitat important pour le rorqual commun et le cachalot et qui s’étend au-delà de Pelagos).

Le sanctuaire est l’un des environnements pélagiques les plus productifs de la mer Méditerranée mais aussi l’un de ceux qui subissent la plus forte pression anthropique.

Dans un cadre aussi complexe, la nécessité d’une structure capable de coordonner les efforts de gouvernance, de recherche scientifique et d’activités de sensibilisation apparaît nettement.

Le Sanctuaire Pelagos, plutôt que d’être considéré comme une zone protégée au sens strict, devrait être perçu pour ce qu’il est réellement c’est-à-dire une zone couverte par un Accord où les actions de protection et de gestion sont menées par trois pays au niveau national. L’Accord trilatéral permet d’assurer une gouvernance efficace grâce à la coordination internationale et à l’implication de tous les acteurs concernés tels que les Parties au niveau national ; le Secrétariat permanent comme coordinateur des Parties (autorités française, italienne et monégasque) dans leurs efforts et comme stimulateur de l’engagement des usagers de la mer ; les représentants du secteur privé ; les ONG environnementales locales et internationales ; les chercheurs ; les autorités locales et les citoyens de la zone couverte par l’Accord.

En intervenant à plusieurs niveaux organisationnels, l’Accord Pelagos représente un forum pour convenir d’interventions coordonnées, d’outils, de politiques et pour favoriser une gestion durable et adaptative au bénéfice des mammifères marins et de leur environnement.

Pour atteindre ses objectifs, l’Accord Pelagos s’est doté d’un plan de gestion et d’action, dont la vision globale est de renforcer l’approche participative de la conservation du Sanctuaire. Le plan de gestion sert de guide, combinant les activités nationales en cours et les nouvelles mesures jugées nécessaires pour gérer dans son ensemble l’espace du Sanctuaire. Ce document détermine les rôles, les priorités et les objectifs, et définit les grandes lignes des activités qui doivent être réalisées dans chacune des grandes catégories telles que la mise en réseau, la sensibilisation, la formation, les bases de données, les archives, les évaluations, les mesures d’atténuation et la gouvernance de l’Accord.

Le plan tente également de rendre plus efficientes ses politiques et ses actions avec celles d’autres accords et conventions internationales, notamment la convention de Barcelone, l’ACCOBAMS, l’Accord Ramoge, l’IWC etc.

Le plan de gestion et d’action est un document fondamental. Il est soumis à des révisions semestrielles pour garantir la mise à jour et l’ajustement des objectifs et des interventions au fil du temps.

Histoire et succès de l’Accord Pelagos

De nombreuses mesures et d’initiatives concrètes de conservation ont été prises depuis la création du Sanctuaire : lois et lignes directrices visant à protéger la biodiversité marine locale, inscription du Sanctuaire sur la liste des ASPIM, programmes de recherche et de conservation, projets de sensibilisation et d’éducation, activités de communication avec les médias, collecte de fonds et tant d’autres encore.

TIMELINE

Années 1980

Le problème des captures accessoires de cétacés résultant de l’utilisation de filets pélagiques est porté à l’attention du public grâce à des organismes de recherche scientifique et des ONG.

1986

Des scientifiques (issus de l’Institut de Recherche Tethys et d’universités), des ONG (SOS Grand Bleu, Greenpeace) et des élus locaux s’élèvent contre les filets dérivants et les captures accidentelles de cétacés dans le bassin liguro-provençal.

1990

Le gouvernement italien publie le décret 18/07/90, qui crée une “zone de protection biologique” [Area of Biological Protection] et interdit aux pêcheurs italiens d’utiliser des filets dérivants en haute mer ainsi que dans les eaux territoriales italiennes, françaises et monégasques de la mer Ligurienne.

1990-1991

L’Institut de Recherche Tethys et l’Association Européenne Rotary pour l’Environnement, avec la participation de plusieurs autres ONG, dont WWF Méditerranée, élaborent et présentent le “Projet Pelagos” pour la création d’une aire marine protégée, une réserve de biosphère, englobant l’habitat le plus important pour les cétacés dans la région, y compris la Haute Mer. Le projet, présenté officiellement au public à Monaco en présence du Prince Rainier III, reçoit le soutien des Rotary Clubs de Milan (Italie), de Monaco et de Saint-Tropez (France).

1993

Signature à Bruxelles d’une déclaration commune pour la création d’un sanctuaire méditerranéen pour les mammifères marins, également connu sous le nom de Sanctuaire corso-liguro-provençal.

1999

La France, l’Italie et la Principauté de Monaco signent l’Accord Pelagos à Rome.

2001

Le Sanctuaire Pelagos devient une ASPIM (aire spécialement protégée d’importance méditerranéenne), comme le prévoit l’article 16 du texte de l’Accord.

2002

L’Accord entre en vigueur avec les lois de ratification des trois pays signataires.

2004

Le premier plan de gestion est adopté.

2006

Etablissement d’un Secrétariat permanent à Gênes (Italie).

2015

Adoption du Plan de gestion (2016-2022).

2017

Signature de l’Accord de siège entre le Gouvernement de S.A.R. le Prince Albert II de Monaco, les Parties et le Secrétariat permanent de l’Accord.

2021

Adoption du nouveau plan de gestion et d’action (2022-2027).

ORGANIGRAMME

La Réunion des Parties (MoP) est l’autorité décisionnelle de l’Accord. Elle a lieu tous les deux ans. La présidence est assurée à tour de rôle par les Parties.

La Réunion des Parties:

  • examine les recommandations du Comité scientifique et technique sur la base de leurs évaluations de l’état de conservation des mammifères marins dans la zone de l’Accord, et des menaces qui les affectent ;
  • évalue les progrès réalisés et tout problème critique dans la mise en œuvre de l’Accord sur la base des rapports des Parties et du Secrétariat permanent ;
  • adopte des résolutions et des initiatives visant à améliorer l’efficacité de l’Accord.

Le Comité scientifique et technique (CST) est l’organe consultatif de l’Accord. Il produit et/ou examine les résultats des évaluations scientifiques sur l’état de conservation des mammifères marins et soumet des recommandations sur les aspects techniques, juridiques et scientifiques de l’Accord et de sa mise en œuvre. La présidence du CST est assurée à tour de rôle tous les deux ans par les Parties.

Le Secrétariat Permanent (SP) est l’organe administratif de l’Accord, il aide les Parties à atteindre les objectifs de l’Accord. Le Secrétariat permanent est composé d’un Secrétaire exécutif et d’un Adjoint. Il est situé à Monaco et bénéficie du soutien administratif du Centre Scientifique de Monaco (CSM).

Ses principales fonctions sont :

  • assurer et faciliter la coopération entre les Parties et avec les organisations internationales gouvernementales et non gouvernementales concernées ;
  • assister les Parties dans l’application de l’Accord en mettant en œuvre les instructions de la MoP ;
  • évaluer le niveau de mise en œuvre des objectifs et des résolutions de l’Accord ;
  • assurer la gestion financière de l’Accord sur la base des décisions de la MoP ;
  • représenter l’Accord auprès des instances internationales, nationales, régionales et locales.

Groupes de travail

Lors de la 8ème Réunion des Parties (Rome, 15-16 décembre 2021), ces dernières ont adopté le Plan de Gestion et d’Action 2022-2027 qui se veut ambitieux. Ce Plan a introduit une nouvelle vision générale de l’Accord ainsi qu’une nouvelle méthodologie de travail.

A cet effet, les Parties ont décidé de créer de nouveaux groupes de travail (GdT) pour établir un processus de consultation à la fois technique et scientifique, participatif et transparent. Ce dispositif permettra de soutenir la mise en œuvre du programme de travail biannuel de l’Accord.

Le Secrétariat permanent peut donc s’appuyer sur l’expertise des memebres de 6 GdT suivant et des 6 SGdT qui y sont liés.

  • GdT Évaluations ;
  • GdT Impacts :
    • SGdT Transport maritime et collisions ;
    • SGdT Bruit ;
    • SGdT Pollution ;
    • SGdT Pêche ;
    • SGdT Bonnes pratiques ;
  • GdT ASPIM-AMP ;
  • GdT Lois ;
  • GdT Gouvernance ;
  • GdT Communication :
    • SGdT Phoque moine.

Ces GdT sont appelés à opérer selon les principes de l’Accord, tel que prévu par le document « Principes directeur sur les méthodes de travail des Groupes de Travail Pelagos » approuvé par les Parties lors de la 9ème Réunion des Parties (25&26 janvier 2024, Nice).

Vous pouvez toujours intégrer les GdT en envoyant votre CV et une lettre de motivation (en anglais) au Secrétariat permanent de l’Accord Pelagos à l’adresse suivante : secretariat@pelagossanctuary.org.

Où se trouve le sanctuaire pelagos ?

Le Sanctuaire couvre une superficie de 87 500 km2 et 2 022 km de côte. La zone comprend les eaux côtières et pélagiques d’une partie du golfe du Lion, de toute la mer Ligurienne, d’une partie du nord de la mer Tyrrhénienne et de la mer de Sardaigne. Elle comprend deux îles principales (la Corse et le nord de la Sardaigne) et plusieurs îles mineures françaises et italiennes.

Ses zones côtières sont densément peuplées et la pression environnementale résultant des activités humaines est particulièrement élevée selon les saisons.

Le Sanctuaire englobe 241 communes côtières : 129 en France, 111 en Italie et une à Monaco.

Crédits photo :
©Hélène Labach – MIRACETI
©M. Costa – Tethys
©Vincent Jacques – Drone de Regard